27/04/2005

Isabelle Duverdier et la philosophie féline


Avec sa trentaine de chats, la maisonnée Duverdier à Lesges fait penser à une communauté hippie, par le nombre des résidents, leurs robes bariolées, leur façon de traiter toute la maison en espace commun – et d’extérioriser leurs sentiments. Les miaulements sont impératifs, les mouvements d’humeur brusques. Un genou est libre ? Et hop ! il y a deux candidats pour s’y lover en ronronnant.
    Plutôt que de diriger, Isabelle Duverdier accompagne ce monde. Des heures de ménage chaque soir évitent les miasmes que génère la promiscuité animale. Son mari Arnaud veille à la discipline : « Aux repas ils ne montent pas sur la table, alors que seuls avec moi ils profitent. »
  Enfant, l’imagination allumée par un stage d’archéologie en collège, Isabelle voulait être égyptologue. Elle est sagement devenue technicienne bactériologique au Laboratoire d’Hydrologie.
« Mes parents n’avaient que des chiens. Mais partie à Amiens et Beauvais pour mes études supérieures, j’ai trouvé une logeuse qui aimait les chats. Ah, bonheur ! » Son long amour prend forme. « Ils me reposent, sont délicats, indépendants mais en même temps proches ; intuition, générosité. ».
    Elle devient bénévole au refuge de Fontenoy, et rentre chaque soir en pleurant. Son projet mûrit. Le moment est venu d’agir. En octobre 2003, avec son mari et Virginie Guillemant, autre bénévole, elle fonde « Au bonheur des chats », pour accueillir les chats de personnes âgées, parties en maison de retraite ou décédées, et pour agir en amont de la détresse, en stérilisant et soignant les chats errants. Les limites qu’elle met à ses actions restent élastiques, cédant souvent devant son souci de secourir les chats. Le téléphone sonne continuellement.
    L’association est financée par les adhérents et parrains, et par des dons, mais le couple Duverdier dépense beaucoup pour la garder à flot.
    Isabelle prend plaisir à raconter chaque chat, ses aventures, misères et traits de caractère. Mais à trente-sept ans elle n’entend pas vieillir entourée de chats « pour ne pas les laisser abandonnés quand je ne serai plus là ».
    La protection animale peut cacher, derrière un dévouement féroce aux bêtes, une déception avec la race humaine. Isabelle Duverdier n’est pas comme ça. « J’aime beaucoup les humains aussi. » Loin d’un rétrécissement, ses priorités lui apportent un épanouissement. Les chats colorent sa vision du monde, mais son regard est exact, généreux, énergique. L’engagement lui donne le courage d’affronter des situations, des dangers (errer dans Soissons pour sauver des chats menacés). Elle fonde une philosophie de vie sur l’amour des chats – quel meilleur modèle du philosophe, d’ailleurs, qu’un chat assis, toutes pattes rentrées, le regard fixé sur l’horizon, ou au‑delà ?


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