23/05/2007

Entre la morgue et le couvent


Angeline Bouille et la détenue se regardent.
« Le tac tac tac des tuyaux de chauffage. » Pour remarquer ce bruit, il faut des oreilles qui manquent terriblement de communication humaine. Par exemple en prison, « entre la morgue et le couvent ». Dans « Le sas », une détenue attend, entre une longue peine et sa sortie redoutée (« Comment payer dans un bistro ? Comment pousser moi-même une porte ? »). Elle revoit les seize ans de brimades, d’amitié restreinte à des relations avec ses codétenues, toujours un peu illégitimes, de privation de son rôle de mère.
Le texte déchirant de Michel Azama, qui reprend des entretiens avec des femmes de la prison de Rennes, a été retrouvé par Angeline Bouille. C’est elle qui dit tous les rôles, en faisant jouer une marionnette de mousse grisâtre.
La question se pose toujours devant les marionnettes : pourquoi ne pas prendre des acteurs, et rendre le jeu littéralement plus humain ? Et la réponse ? Une actrice ne saurait guère assumer ce rôle d’une femme jouet des circonstances, subissant son sort, exposée nue aux regards alors qu’elle frise l’obésité, sans gêner les spectateurs, ou bien les éloigner par une performance de star. Cette loque nous atteint directement par sa vulnérabilité, son état d’objet. Comme son expressivité dans les mains de la marionnettiste est absolue, il peut même venir une envie de réagir, lui montrer de la compassion, lui prendre la main.
L’Union

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