27/05/2005

"La ferme des animaux" au Petit Bouffon



Devant la salle cossue et conviviale du Petit Bouffon, un acteur raconte l’histoire terrifiante d’animaux de ferme, las de trimer sous la dictature de Mister Jones, et qui se révoltent pour faire une société dans laquelle « tous les animaux sont égaux ». La lutte est sanglante. Après un élan de liberté, les cochons prennent progressivement le pouvoir, utilisant la terreur comme outil de gouvernement. Napoléon le porc finit par adopter la posture et les habitudes des humains chassés, sa dictature plus implacable que celle qui avait été renversée. Le slogan égalitaire reste peint sur le pignon de la grange, sauf qu’une main y a ajouté «  mais certains animaux sont plus égaux que les autres ».
Cette fable animalière de George Orwell, publiée en 1945, traduit l’histoire de la Révolution russe, et l’avènement du stalinisme triomphant.
Pour dire cette tragédie, Gilbert Ponté déploie un investissement physique dont la générosité comique subjugue. Dans ses gestes et par sa voix, il devient Ben, le vieil âne fourbu, Lubie la jument qui ne pense qu’à retrouver des rubans pour sa crinière, le petit coq porte‑parole à la loyauté terrorisée, et le cheval de trait, dont l’enthousiasme entier pour la cause ne le sauve pas de l’abattoir une fois sa force épuisée.
Cinquante ans après la mort de Staline, le conte cogne encore. La liberté dont Eluard écrivait le nom reste une notion incertaine, surtout quand elle est proclamée par les pouvoirs en place.
L’Union

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