Une pièce sur une transsexuelle, jouée par Jean-Claude Dreyfus, célèbre
pour ses numéros transformistes au cabaret de la « Grande Eugène » :
sera-ce un spectacle extravagant qui fera rire aux éclats ? En fait,
« Mardi au Monoprix » est une tragédie, de l’amour et de la mort.
Marie-Pierre, née Jean-Pierre, raconte sa visite du mardi à son père, pour faire
les courses avec lui. Il refuse le changement de son fils, et le lui dit de la
façon la plus brutale. Marie-Pierre l’aime à la folie –serait-elle même devenue
telle quelle pour en faire son homme ? Elle s’efface devant lui, femme
soumise, acharnée du ménage. Il en est encore plus furieux : « Alors tu fais ta petite bonne
femme ? » Il a honte d’être avec cette grosse créature que regarde
tout le monde.
Jean-Claude Dreyfus utilise son corps massif, une voix un peu essoufflée,
pour bannir toute féminité conventionnelle de son jeu. Marie-Pierre est femme,
mais dépourvue du tralala d’un travesti. Par ailleurs, par les constants gestes
stylisés de ses mains, qui annoncent, accompagnent, enregistrent les
événements, il en fait une cérémonie, dans laquelle la souffrance, la honte,
l’amour impossible ne peuvent jamais se dissiper dans un faux naturalisme
théâtralisé.
Sauf le mardi, Marie-Pierre se prostitue. Sa mort sous les coups de
couteau de son dernier client révèle enfin le vrai sens du décor, un rideau irisé
aux allures d’un cabaret de l’au-delà.
L’Union
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