22/12/2008

Spécial Noël : l’homme qui arrête les pendules


Pour notre série retraçant le chemin qui mène à un engagement bénévole, nous recevons celui qui ne passe par Soissons qu’une fois par an, à vitesse grand V.

Rendez-vous en haut. Les bras autour d’une souche de cheminée, j’attends au-dessus de la ville. Les étoiles brillent, les guirlandes de rue clignotent, avec Saint Jean des Vignes et la cathédrale au loin. Etre correspondant de presse c’est passionnant, mais qu’est-ce que ça caille !
Tintement de clochettes, claquement de pieds ferrés sur le toit, et la luge est là, derrière dix rennes. Le Père Noël arrive à Soissons ! Il accepte de se raconter.
Né dans les neiges du Nord il grandit dans un igloo. « Mon gros ventre me rappelle cette première demeure, et ma barbe blanche la neige. » La robe cramoisie ? « Pour passer inaperçu. »
Père Noël  se cache : "Pour passer inaperçu."
Comment devient-il le bienfaiteur des enfants ? Tout son village est pauvre, et pour tout Noël les enfants ne reçoivent qu’une boule de neige. « Pour mon premier fils j’ai fait d’un bout de bois un jouet. Son meilleur ami l’a demandé, et il le lui a donné. J’y ai vu la misère du monde et la richesse de la générosité. Les enfants se passent exponentiellement le mot, et me voilà multinationale des cadeaux de Noël. »
Les parents qui paient eux-mêmes un cadeau au magasin ? « Je les rembourse contre reçu. » « Où trouvez-vous les fonds nécessaires ? » « Mon petit gars, il y en a partout : le fond de ma poche, le fond de la mer, le fond de ma pensée, le ski de fond, la lame de fond, les élèves au fond de la classe… C’est simple, au fond. »
Un scientifique a prouvé que sa tournée est impossible en une nuit. « Il ne sait pas qu’entre minuit et minuit un j’arrête toutes les pendules du monde, le temps qu’il me faut. Regarde ! » En effet, plus de clignotement en bas, un homme qui traversait la rue reste un pied sur le trottoir, un pied dans le caniveau. Même la fumée qui monte des cheminées s’immobilise dans l’air.
« Quel est votre vrai nom ? » Le Père Noël se penche pour le souffler dans mon oreille. Mais les rennes s’impatientent, les clochettes tintent avec insistance, et je n’entends pas ce qu’il dit. « Plait-il ? » Trop tard. L’attelage se met en branle, il y monte et part dans un énorme éclat de rire à faire trembler les fenêtres du centre ville. Les lumières reclignotent, l’homme traverse la rue sans rien remarquer, la fumée repart en spirale. Et les cadeaux ? Il n’a pas eu le temps ! Je regarde ma montre : elle est à l’heure exacte où je m’étais aventuré sur le toit. Les enfants de Soissons pourront jouer demain.
L’Union

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