16/01/2009

Le dérèglement des sens au Mail


L’homme pense que son cerveau est une petite machine bien huilée qui ronronne entre ses oreilles et ne se dérègle qu’en s’endormant. Le neurologue anglais Oliver Sacks, en faisant connaître diverses formes de la pathologie des perceptions, a montré que l’équilibre mental est bien cela : maîtriser le monde des sens et de l’expérience est un exploit d’équilibriste. Sur la corde raide du quotidien, chacun s’ajuste aux événements et aux pensées qui le bousculent.
Bruno Buffoli et Henri Botte, avec une clarté de jeu parfaite et sans aucun superflu théâtral, jouent quelques exemples de ces dérèglements des sens, adaptés par Peter Brook du livre de Sacks, « L’homme qui prenait sa femme pour un chapeau ». Il y a celui qui perd à chaque instant la mémoire du précédent, celui qui n’a le sens de son corps qu’en le regardant ou le touchant, et bien sûr celui qui, n’ayant que la conscience des formes géométriques, confond la tête de sa femme avec son chapeau.
Le propos de la pièce est éclairé par la mise en scène de François Godart, lumineuse dans sa simplicité, et même littéralement, car l’utilisation d’une webcam et d’un grand écran blanc au fond enrichit et intrigue. Le public parti, il a retravaillé avec les acteurs, allant jusqu’à modifier l’appui à donner à tel mot.
Voilà le genre de théâtre qui envoie ses spectateurs dehors avec, non seulement le souvenir d’un spectacle bien balancé, mais un regard rénové sur le monde qu’ils perçoivent.
L’Union

Le public parti, François Godart (à droite) travaille le texte avec Bruno Buffoli.

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