Ayant parcouru
tous les registres, du comique au tragique, du profond au divertissant, du traditionnel
à l’expérimental et, admettons-le, parfois l’ennuyeux, il ne restait à la
saison culturelle qu’à terminer dans le sublime. Les « Variations
Goldberg », jouées par le claveciniste américain Kenneth Weiss, ont fait
l’affaire.
L’étonnant dans ces trente variations est la combinaison de leur simplicité
mélodique – chacune suit l’autre en variant le ton, du spectaculaire au dansant
au folklorique – avec une structure harmonique à la fois mathématique et
philosophique : le retour de l’aria initiale laisse entendre que tout
recommence, même que d’autres variations attendent, inépuisables.
Le musicien est austère : il arrive sur l’estrade en costume
sombre, joue et repart. Il garde sa réserve même pendant les rappels. Sa
réputation ne doit pas parasiter notre attention.
La même œuvre jouée au piano à l’Arsenal par Zhu Xiao Mei en 2009 était
émouvante. Kenneth Weiss au clavecin la met à une distance de l’émotion, de la
beauté. Il paraît – paraît ! – éviter une « interprétation ». Sous
ses doigts, Bach atteint ce qui est derrière l’art, c'est-à-dire le sacré.
Il est difficile d’imaginer un meilleur cadre pour cet exercice que la
chapelle désaffectée. Libérée des rites liturgiques, elle ne garde de son passé
qu’un parfum, un écho de quelque chose qui tient également du sacré.
Le public a pu repartir à la fois exalté et apaisé. C’est cela,
n’est-ce pas, le sublime ?
L’Union
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