17/11/2012

La douleur devant un micro

La jeune survivante paraplégique,
 jouée par Maud Wyler.
Un car scolaire s’écrase dans un lac gelé de la Nouvelle Angleterre, tuant presque tous les enfants du voisinage. La conductrice du car, le père de deux victimes et une jeune fille laissée paraplégique racontent ce qui s’est passé. Un avocat new-yorkais entend envenimer les choses pour en tirer profit, tout en portant lui-même une autre douleur. En adaptant et en mettant en scène le roman « De beaux lendemains » de Russel Banks, Emmanuel Meirieu était conscient du risque de laisser basculer cette histoire poignante dans le larmoiement.
    Il épure alors le décor. Sur le plateau nu, des flocons de neige qui tombent forment de vagues congères. Des ombres et des nuages sont projetés sur le tulle qui filtre la lumière devant la scène.
    La mise en scène exclut toute action. Alors qu’un pianiste sur scène égrène quelques notes, les narrateurs se succèdent pour exposer des souffrances qui ont défait les vies individuelles et la vie collective.
    Le seul point de stabilité est le micro qu’ils utilisent. Il attend sur un pied que la conductrice vienne raconter l’accident, et c’est elle, revenue à la fin, qui le pose par terre en quittant le plateau. Il formalise, fait résonner les mots. Les monologues intimes en deviennent des témoignages livrés pour convaincre.
    Cette démarche n’affaiblit-elle pas l’impact ? Au contraire, elle met les spectateurs dans la situation du public d’une conférence ou au tribunal, empêchés de se réfugier dans l’émotion soulageante. L’affliction reste crue, s’emporte même après le spectacle.
L'Union

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