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Le cinéaste suicidaire filme une actrice à qui l’on annonce la mort de son enfant. |
« La nuit tombe » est un étrange spectacle, et l’auteur et metteur en scène Guillaume Vincent cultive cette étrangeté. Tout est fait pour générer l’angoisse d’un film à suspense. Le dispositif scénique, une chambre d’hôtel ni belle ni laide – faisant penser au vide désolant d’une image d’Edward Hopper – s’adapte ingénieusement à l’intrigue. Notamment, derrière sa porte, la salle de bains est utilisée pour créer des frissons inhabituels au théâtre : une personne y pénètre, un cri strident d’entend, la lumière est coupée. Ou l’un entre et un autre sort. De l’eau inonde les marches devant. Les voix sont amplifiées avec une tonalité âpre, et des haut-parleurs dans la salle reproduisent les bruits de scène, un peu décalés. Des sous-titres sont projetés sous des dialogues en allemand, russe, italien.
Trois couples fréquentent cette chambre, se croisant sans se voir, remontant dans le temps, revenant ; sont-ils réels, fantomatiques ou morts ? Le suicide, la mort, la maternité les obsèdent. C’est comme un ensemble de mauvais rêves, mais qui, au lieu de rester solitaires à l'intérieur de chaque tête, s'enchevêtrent. L’interférence transforme chaque rêve en une réalité partagée mais dont les composants restent oniriques.
Les applaudissements du public étaient corrects, sans plus. Ce monde de chronologie fractionnée, d’appréhensions a pu peser sur les esprits comme après un film. Le spectateur est plutôt seul au cinéma, alors qu’au théâtre il partage les réactions à une expérience collective.
L'Union
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