11/05/2006

Les Têtes raides : frappadingues comme jamais

Le premier impact est le bruit, ce mur de son qui menace à tout moment de s’effondrer sur le public, en emportant tous les tympans dans sa chute. Mais en fait il est dosé, pour étourdir sans assourdir, pour créer un seul espace sonore.
    Des effets de lumière empêchent toute habituation : des projecteurs clignotent, balaient la scène et la salle, baissent, augmentent, changent de couleur. Pendant une chanson, une lampe avec un abat-jour sinistre d’entrepôt descend au-dessus de la tête du chanteur, Christian Olivier, qui d’un coup de main l’envoie brinquebaler au-dessus du public. Elle revient sur la scène, repart vers la salle. Le mouvement chamboule la séparation entre artistes et spectateurs, les inclut tous dans le même tangage frappadingue.
    Un violoncelle, à priori aussi incongru dans ce cadre qu’un chausson de ballet entouré de planches à roulettes, s’intègre parfaitement, car la violoncelliste le joue en vraie rockeuse (et le remplace parfois par un violon, qu’elle tient debout, sur ses genoux).
    Derrière cette agitation, les Têtes Raides utilisent le rock comme support de la tradition de la chanson française, et pour accompagner des textes qui ont de la tenue, écrits par eux-mêmes ou dénichés chez des auteurs. L’intégrité de leurs positions artistiques, musicales et politiques n’a jamais failli depuis leurs débuts.
    Pour apprécier la subtilité de leur travail, il vaut évidemment mieux baisser le volume et écouter leurs disques. Le concert ménage plutôt  une rencontre festive, donne une occasion de célébrer l’engagement des uns envers les autres. S’il y a un mot qui caractérise un concert rock, c’est « paroxysme ». La musique, son volume, l’éclairage amènent la salle jusqu’à un point culminant. Puis il y a un répit, puis tout s’amplifie à nouveau. Il ne s’agit pourtant pas d’une manipulation, mais d’une intensité partagée.
    Les Têtes Raides proposent des concerts debout, et des concerts assis, comme celui du centre culturel de Soissons. Mais presque tout le monde s’est mis assez vite debout, et beaucoup ont quitté leur place pour se grouper devant la scène.
    La salle n’était pas pleine mais, pour le tromboniste « Kropol » (« j’ai beaucoup de surnoms dans le groupe »), commentant le concert le lendemain, c’était « le meilleur concert depuis un mois ». Il explique qu’une foule enthousiaste peut générer une sorte de délire chez les musiciens, aux dépens de la qualité. « Quand le public est plus restreint, il faut faire attention, se concentrer, serrer les boulons. »
L’Union

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