La Bulgarie est entrée
dans l’Union européenne au début de l’année. Aglaé Simoës de Braine, étudiante
en sociologie à Lille, mais qui passe une année universitaire à Plovdiv en
Bulgarie, a tout vu. Comment se sont passées les réjouissances pour marquer cet
événement ? « En fait, j’ai vu seulement des gens dans la rue qui faisaient
signer une pétition contre la nouvelle interdiction de distiller leur propre
rakia » – le rakia étant un redoutable alcool à base de jus de fruit
fermenté. L’idée de l’Europe a du mal à surmonter les préoccupations personnelles.
Aglaé
a fait goûter le rakia autour d’elle pendant un retour rapide à Braine, pour
assister à une soirée organisée par Madomé, l’association de coopération avec
un village du Mali, dont elle est membre. Elle devait y rendre compte d’un
voyage en 2006, quand un groupe de jeunes, dont elle-même, a clôturé un terrain
dans le village. Son engagement humanitaire a d’ailleurs été démontré dans « Aglaé Simoës : par curiosité d'esprit » du 01/02/06.
Elle
est partie en Bulgarie en vertu d’un accord bulgare avec l’université de Lille.
Plovdiv est une des plus anciennes villes d’Europe, contemporaine de Troie et
de Mycènes, puis centre romain, berceau du nationalisme sous les Ottomans, et où
le mouvement démocratique qui a amené la fin du régime communiste en 1989 a
pris pied.
Flûtiste
depuis des années au Conservatoire de Soissons, elle suit des cours d’ethnomusicologie.
Seulement, le bulgare est une barrière à toute compréhension de ce qui se passe,
et elle peine à l’acquérir. L’utilisation de l’alphabet cyrillique rend opaques
même les mots simples. Elle déchiffre les lettres comme on compose un puzzle,
et sait écrire son adresse. Elle habite – en colocation avec deux Espagnoles –
« Kioutchouk Parich. », vieux quartier turc délabré qu’on nomme
ainsi, par dérision, « Petit Paris ».
Elle
assiste avec assiduité aux cours, pour montrer sa bonne volonté. « Comme
je n’y comprends pas grande chose, si en plus je n’y vais pas… » Par
son caractère, Aglaé se donne à fond à ce qui se présente dans sa vie : il importe moins d'amasser des connaissances avec
tant de mal, que de se débrouiller dans un contexte à la fois étranger et
étrange.
Si
tout avait été accessible et simple, Aglaé serait rentrée avec une bonne connaissance
des musiques slaves, des notions d’une langue slave, et des anecdotes à
raconter. Plongée jusqu’au cou comme elle est dans cette aventure déroutante en
Europe de l’est, dans un pays au passé tumultueux, au présent vacillant, au
futur incertain, elle y touche sans doute à quelque chose de profond, d’intime,
un sens du pays plus qu’un savoir. Plus tard, sociologue, elle sera préoccupée
par des données précises et statistiques. A Plovdiv elle accumule des richesses
moins académiques qu’humaines, moins sociologiques qu’impressionnistes.
L’Union
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