Si le choix des
sujets au camping municipal avait une base statistique, il y aurait une grande
majorité de Néerlandais dans ces colonnes. Avec leurs véhicules à plaques
jaunes, ils occupent plus d’emplacements
que tous les autres réunis.
Mais
aborder Rien (se dit « Rine ») et Elly de Jonge n’est pas une
démarche mathématique. Simplement, ils sont là à côté d'une petite caravane,
avec un accueil souriant, une invitation à s'asseoir, amusés à l'idée de se
trouver dans un journal français.
Suit
la négociation linguistique. De l'anglais au français, pour se fixer enfin sur
le néerlandais. Ils y sont plus à l'aise, c'est le plus important, même si de
l'autre côté des échanges il faudra ramer.
Rien
est publicitaire à la retraite. Il raconte d’une voix posée son
parcours : naissance en Zélande, formation de graphiste, travail
salarié puis création de sa propre entreprise.
Elly,
née à Amsterdam, a été assistante sociale, mais se tourne de plus en plus à la
sculpture et la céramique, au point de vouloir en vivre en vendant et exposant.
« Pourquoi pas un jour à Soissons ? » se demande-t-elle.
Créer est un plaisir ? « Bien sûr, mais aussi une lutte. »
Elle agrippe l’air devant elle, devenue soudain combattante. Sous le nom d’Elly
van Weerdenburg, elle a déjà une réputation locale, et ses oeuvres se trouvent
sur Internet.
Mariés
depuis bientôt vingt ans, ils habitent le Veluwe, réserve naturelle près
d'Arnhem qui abrite le célèbre musée Kroller-Müller.
Ils
sont arrivés à Soissons sur la foi d'un avis favorable au sujet du camping sur
Internet. Ils se trouvent si bien ici que, contrairement à leur habitude, ils
s’y installent à demeure. Leurs sorties dans la région suivent les indications
de la brochure « Trésors et merveilles de l’Aisne » : Coucy,
Prémontré, Laon, Compiègne, Amiens. Tout leur plaît. Ils aiment Soissons, dans
sa campagne aux champs dorés et côtes boisées. Rien trace leurs contours avec
ses mains. Ils y trouvent l'esprit authentique de la France, « notre
pays préféré », dont ils relèvent le « savoir-vivre » comme
ils l’appellent, et le sens de la liberté, par rapport aux Pays Bas et ses
règlementations tatillonnes.
S’étant
racontés, et sur les conseils d’un autre campeur, ils partent le long de
l’Aisne, sacs en plastique à la main : « Nous
allons cueillir des mûres sauvages. »
L’Union
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