Un lieu qui compte si peu que les trains
passent sans s’arrêter. Trois forains sur la touche, Eddie le bourru, Nono le
bourré et la diminutive Jackie qui impose les règles – avec un accent picard, pour
le grand plaisir du public au Mail. Un monticule au milieu de la scène, comme
un îlot sur lequel vivent ces trois naufragés. Voilà la situation au début des
« Forains » de Stéphane Wojtowicz.
Nathalie Cerdà montre son tatouage de foraine. |
Puis un train s’arrête. Il en descend
Hélène pour éviter son mari, et Olivier, juste pour voir. Le train repart
aussitôt, et ils mesurent vite la distance vertigineuse qui sépare le monde des
forains du leur. Elle s’en réjouit avec un enthousiasme démesuré, jusqu’à
déclarer « sublimes ! » des raviolis dont l’odeur douceâtre
flotte encore dans les loges après le spectacle. Lui propose d’aider ces paumés
sans même essayer de cacher son hilarité et son mépris pour leur incurie.
Le choc des cultures est rude. Les
transfuges du monde des nantis perdent vite leur rang devant la gouaille et la
brusquerie des exclus de ce monde-là. La violence plane. Hélène et Olivier sont
réduits à trimer pour les forains qui, eux, voient soudain un second train
s’arrêter. Ils s’en vont gaiement. Leurs victimes restent là. La pièce finit
par virer du comique naturaliste au troublant : arriveront-ils à se sauver,
dans les deux sens du terme ?
L’Union
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