20/03/2011

Le théâtre de la cruauté


La compagnie qui jouait « Monsieur de Pourceaugnac » de Molière au Mail ne voulait que 150 jeunes spectateurs dans la salle, pour éviter des « débordements ». 300 ont été enfin admis, dont toutes les 6èmes du collège Saint-Just. Ils ont réagi avec un entrain jamais chahuteur.
La pièce raconte les malheurs d’un Limousin entre les mains de Parisiens qui cherchent, non seulement à le faire repartir, mais à le tourmenter. Le metteur en scène Isabelle Starkier a donné le rôle à un acteur noir. Cela génère un malaise mordant. Quand deux Suisses veulent le pendre, en espérant « le voir gambiller les pieds en haut », les lynchages aux USA ne peuvent que venir à l’esprit.
Sa mise en scène tend à reléguer le texte de Molière derrière une effervescence insistante, qui a fait bien rire les jeunes spectateurs, mais même devant les scènes de cruauté, dont un viol.
En revanche, les comédiens, en répondant à une multitude de questions après la représentation, ont fourni une belle leçon de théâtre. Ils ont insisté sur la nécessité de distinguer entre un personnage et la personne qui le joue. Daniel Jean, dans le rôle de Pourceaugnac, ne se sentait-il pas ridicule en slip devant tout le monde ? « Pas du tout, je suis acteur, je faisais mon métier. Ce n’est pas moi qui suis humilié, c’est lui. » Les élèves ont appris ainsi la « distanciation » qui fait la différence entre le théâtre et les amalgames de la téléréalité.
L’Union

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