Dans le
jardin de Jean-Hugues Lenoir et Colette Clauet à Crouy, un haut cèdre cache à
moitié la façade de la maison. N’est-il pas logique pour des philosophes de
mener leur réflexion en interposant un écran entre eux et la
quotidienneté ? Méprise : « L’arbre est en sursis. Nous
venons d’acheter, et il est beau, mais prend trop de lumière. »
Pour Jean-Hugues Lenoir, son intérêt pour la philosophie ne doit pas le
couper du monde. « Je n’aime pas rester indifférent à ce qui
m’entoure. » Actif dans bien des domaines, activiste dans plusieurs,
il prône tout de même une réflexion de fond pour éclairer l’action.
Né à Reims, après le lycée il réussit le concours d’entrée de l’Ecole
normale de Laon, et devient instituteur. Sa carrière est menée dans le
Soissonnais, dans des villages comme Acy et Mercin-et-Vaux. Directeur d’école
depuis dix ans, il est actuellement en poste à Vauxbuin.
Son collier de barbe lui donne un air instit 3e République,
mais ses idées sont progressistes. Sans être réticent sur le détail de sa vie,
il prend surtout plaisir à parler de l’histoire de l’Instruction publique, du
syndicalisme enseignant. Il a été militant, comme enseignant et comme parent –
c’est au Conseil d’administration du lycée Léonard da Vinci qu’il a rencontré
Colette, professeur de maths et membre comme lui de la FCPE.
Le but de l’éducation ? « Apprendre à lire, écrire et
compter. Ce sont les techniques. Ensuite, pour comprendre, il faut la culture.
C’est comme apprendre à conduire, pour pouvoir rouler à travers le
monde. » Et pour l’enseignant, le métier requiert un renouvellement
sans fin. « On ne peut pas toujours faire la même chose. »
A côté des combats pédagogiques et syndicaux, il s’est engagé
politiquement, au parti Socialiste, et a même été conseiller municipal
d’opposition à Acy.
En parallèle, il a fréquenté des groupes de réflexion, qui le rapprochent
de la philosophie. A Saint Quentin il y a quelques années, le couple rencontre
Emmanuel Mousset, professeur de philo qui a fondé « Citoy’Aisne »,
pour « promouvoir les actions d’éducation à la citoyenneté ». Il
accepte de venir à Soissons, animer des « café philo » au Havana. Jean-Hugues le remplace parfois, intimidé la
première fois, devant « L’avenir n’est-il pas qu’une page
blanche ? » Les philosophes, de métier ou d’esprit, ne prétendent pas
trouver une réponse, mais plutôt de susciter un questionnement, éveiller les
consciences – et prendre leur pied à échanger des idées.
Jean-Hugues Lenoir écrit aussi de la poésie, mais rien n’est plus loin du
cliché du poète philosophe plongé dans des élucubrations obscures, évitant la
réalité. Pour lui il s’agit, au contraire, d’une urgence. Il y a une phrase
qu’il aime citer : « Le travail n’est pas terminé, l’heure du
repos n’est pas arrivé. »
L’Union
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires seront vus avant d'être affichés.