La
danse traditionnelle française, les « bourrées, les « pas
d’été », déjà amoindrie par l’industrialisation de la société, est encore
affaiblie, comme en Picardie, par la guerre de 14‑18. Le collectage » par
des chercheurs comme J.‑M. Guilcher, et la fondation en 1952 par Jacques Douai
d’une troupe professionnelle, Chants & Danses de France, apportent un
renouveau d’intérêt.
Didier
Lhotte a vu son premier spectacle en 1969, et l’inspiration reste intacte.
Etudiant à Versailles, il commence à danser avec une troupe amateur parisienne.
Devenu psychologue à Soissons, «chaque soir pendant trois mois,
j’allais après mon travail danser à Paris. On se maquillait dans la voiture.»
C’est un monde
de rivalités. Après treize ans, il est «remercié» - «c’est
à dire viré» - pour avoir gardé des relations avec Jacques Douai.
«Avec son encouragement, j’ai établi une structure à Soissons en 1984.»
Il chorégraphie les spectacles, dont «La Malle à Danses», tour de
France de la danse régionale, en assumant le paradoxe qui consiste à mettre en
scène ce qui se pratiquait à l’origine pour le plaisir, non pas pour être
regardé. La préoccupation de Didier est de garder un équilibre entre la
fidélité aux sources documentées, et le besoin de tenir le public. «Dans
un pas d’été, tel qu’il était dansé, un spectateur ne verrait qu’une rangée de
fesses. Nous l’avons ouvert, adapté.» Certains cercles folkloriques
sont prompts à cibler cette «trahison». «Chaque fois,
j’explique le choix qui a été fait. D’ailleurs, c’est souvent nous qui avons
raison.»
A Ressons‑le‑Long,
une pièce de la maison de Didier et sa femme Dominique, danseuse elle aussi,
est réservée à l’activité de Chants & Danses. «Même le grenier de
ma mère est rempli de nos costumes.»
Avoir une
conversation avec Didier, c’est trouver la table vite recouverte de livres, de
revues. Pour chaque date, chaque information, il sort une référence. Les
spectacles, les stages (plus de deux cents), les livres, les documents
chorégraphiques, les partitions, les enregistrements, tout est archivé. «Il
faut avoir la connaissance de ce qu’on fait.» Est‑il aussi
méticuleux, aussi documenté, dans son travail actuel avec des
adolescents ? «Pas du tout ! Si je notais tout, je ne
pourrais pas écouter. Ou je n’entendrais que ce qui est dit, sans apercevoir ce
qui s’exprime dans le regard, les gestes.»
Avec son air conciliant et ses cheveux roux - «Ça c’est la
Normandie de ma mère» - il serait tentant de voir en Didier Lhotte un
doux fervent d’une tradition devenue confidentielle. Ne nous trompons pas :
c’est un poids lourd, de renom national, dans la promotion de la grande
tradition d’une France qui dansait, et qui danse encore.L'Union
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