Paule
Cascalès‑Pardon parle avec un sourire et un ton résolument positif de ses
expériences et de ses valeurs. Mais en citant des paroles de Claude
Lemesle : « Chanter, avoir mal, avoir peur mais chanter »,
elle laisse entendre qu’il y a des fractures et des défis dans la vie, à
affronter avec courage.
Son piano l'a suivie depuis l'Algérie |
Pourtant, quand elle naît près de Sidi bel Abbès, dans
une famille d’origine espagnole, mais établie en Algérie depuis cinq
générations, tout laisse supposer la permanence. Elle fait sa première
rencontre avec la musique quand une institutrice voisine de palier lui donne
des leçons de piano.
Mais en 1962 les accords d’Evian sont signés,
l’indépendance arrive, et la famille Cascalès, chacun avec sa valise, se joint
à l’exode par mer des Pieds Noirs. Son père, instituteur, trouve un poste à
Soissons. Quand leurs meubles arrivent en novembre, le piano, resté des mois
sous la pluie, est muet, comme pour protester. « Puis, avec le
chauffage central, le piano a commencé à sécher, et le son est revenu. Ca nous
a aidés à commencer cette nouvelle vie. » Comment ne pas choisir
l’optimisme après un tel renouveau ?
Elle continue ses leçons de piano, au collège et au
Conservatoire, et chante à la chorale. « J’ai trouvé une autre
professeur aussi formidable que la première – que je vois encore, près de
Montpellier. »
Paule devient institutrice à son tour. « J’ai eu
la chance d’enseigner en Maternelle, et de pouvoir nourrir la créativité par le
dessin, la poésie – et la musique. » Elle fait toute sa carrière à
l’école de l’Enfant Jésus, jusqu’à la retraite. Cette continuité est perturbée,
cependant, par des ennuis de santé, qu’elle attribue à une « grosse
contrariété professionnelle ». Considérant que sa maladie n’a
pas valeur d’exemple, « comme un cancer », elle tait les
détails.
En 1980, elle devient présidente d’une nouvelle chorale,
la Musarelle. Chanter ne se limite pas à travailler la voix : elle y
trouve un chemin vers les autres. « Ecouter chanter son voisin, c’est
connaître ses humeurs, sa personnalité. » Les liens se tissent, les
pupitres se charrient joyeusement, et elle garde le contact avec les anciens.
Vient encore une interruption quand, avec d’autres, Paule s’en va, crée et
préside une deuxième chorale, la Campanelle, au répertoire plus varié :
« Chanter pendant deux heures une page d’Amen, c’était trop pour moi. »
A côté du chant, de l’enseignement, et des activités
comme le secourisme, un long rêve d’enfants se réalise avec son mari
Henri : ils ont deux fils.
« Il y a toujours l’espoir dans la vie »
affirme‑t‑elle, non pas pour répéter une banalité, mais par expérience.
Parfois, comme avec son piano exilé, la vie dépasse l’espoir.
L’Union
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