Arthur Dufourg a dix‑sept ans et voudrait rendre le monde
meilleur. Il en brûle d’énergie, tout en prenant un ton rangé pour parler de
lui‑même, ses idéaux, ses croyances.
Après un bac scientifique à Saint
Rémy, il a viré au littéraire, et fait actuellement une classe de prépa en
lettres à Lille, avec latin et la découverte du grec. Il déguste le plaisir de
lire les grands auteurs.
Cet été, pour la seconde fois,
Arthur a accompagné le pèlerinage diocésain à Lourdes, organisé par l’Hospitalité
de Soissons, comme brancardier. Garde de nuit dans le train, des journées
interminables à charrier, à alimenter, à divertir et à prier avec les malades.
Pour les douteurs, Lourdes c’est
simple. Un malade qui en revient encore avec ses béquilles a perdu son temps.
Mais une personne handicapée a deux relations avec son infirmité, l’une intime,
dans son corps, l’autre publique, dans ses contacts avec les autres. Jour après
jour, le regard du monde confirme la condition d’estropié, en s’apitoyant ou en
trahissant une répugnance. La personne handicapée vit répudiée. A Lourdes,
l’infirmité est partout, mais les yeux ne voient que le courage avec laquelle
elle est portée. Soudain, les personnes handicapées sont au milieu du monde.
Miraculeusement. Qui ne repartirait pas transformé ?
« Les malades valides à 20 pour cent
vivent à 40 pour cent. C’est plus fort que tout, leur opiniâtreté. Je
retournerai tant que je pourrai. » Fatigant d’être à côté d’eux ?
Les bénévoles festoient dans les cafés de Lourdes jusqu’à trois, quatre heures
du matin. « Mais jamais d’écart » : Arthur en conclut que
la confiance est toujours plus efficace qu’une discipline imposée.
La religion a pris beaucoup de place
dans sa vie. « C’est pas être croyant que d’aller à l’église une fois
par semaine. » Il devient scout, s’engage dans la pastorale au lycée,
se joint à la marche des jeunes à Liesse. « Les gens donnaient leur
temps, ne croyaient pas à la fatalité. » Devenir prêtre, alors ?
« Spirituellement ce serait très bien, mais j’ai trop la bougeotte. »
Ses aspirations vont de
l’environnement – « aider la nature à retrouver l’équilibre que les
hommes ont déréglé » - à la politique, où « la course des
ambitieux » serait remplacée par un système dont il revendique avec un
sourire l’utopisme. Il est lucide quant à cette foi qu’il met avec tant de
vigueur au service de ses idéaux. « On
ne peut pas ne pas douter. » Pour lui, Dieu est « une idée concrète de la bonne volonté ».
Ses enthousiasmes sont jeunes comme
lui. Un jour, Arthur montrera sa trempe. Guerrier de l’environnement, soldat
comme son père, prêtre – ou saxophoniste, un autre intérêt ? « Il suffit d’être humain » dit
Arthur.
L’Union
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