Le cor n’est
pas un instrument modeste. Il se fait entendre, appelle à l’action, voire au
combat. Le corniste Jean-Philippe Pouilhe n’a pas choisi un effacement qui
aurait pu l’abriter. « Je suis né à Soissons ; j’ai grandi – pas
beaucoup – à Soissons. » C’est donc lui qui aborde le fait que ceux qu’il
fréquente le dépassent généralement d’une bonne tête. Il évoque sa taille, et
les origines de son handicap, pour éviter que le sujet ne parasite les échanges,
en restant non dit.
Son nom est
auvergnat. « Rude contrée » dit-il en évoquant les vacances avec
son père instituteur dans le pays du grand-père, blessé trois fois à la guerre dans
l’Aisne et qui est resté à Soissons dans un emploi créé pour les invalides.
Jean-Philippe
est envoyé à l’école de musique à huit ans, pour apprendre la trompette. « J'y
traînais. » Mais après deux ans il devient un des premiers élèves d’un
grand corniste retraité dans le Soissonnais. « Paul Vangheluwe, lui, nous
a fait vivre la musique. »
En disant son
histoire musicale, Jean-Philippe cite beaucoup de noms de musiciens, d’amis. Il
est éloquent sur leur rôle, et parle de chacun avec considération, reconnaissance
et amitié. Il ne cherche pas à tirer la partition à lui.
« Je
rentrais épuisé des leçons, puis voulais rejouer tout de suite. » Encore lycéen, il commence à jouer dans la région, rejoint l’Harmonie municipale,
le Cercle musical. Un soir de 1983, sur un banc avec deux amis, l’idée leur
vient de créer un ensemble. Les Cuivres Soissonais sont nés, et donnent leur
premier concert aux Arquebusiers.
A part la
musique, qui aurait pu être son métier, il commence la faculté à Reims. Mais des
difficultés chez ses parents l’amènent à entrer aux Chèques postaux à Paris. Il
se marie, devient fonctionnaire de préfecture. « La vie musicale y
était intéressante, mais c’était le week-end, et je n’aspirais qu’à jouer ici
avec mes amis. » En 1998, la famille rentre à Soissons « parce
que j’y ai tant de liens ». Il travaille à la sous-préfecture.
Après une
période faste, l’ensemble de cuivres vit un passage à vide. En 2004, la
décision est prise d’accepter l’offre de se rapprocher du Conservatoire de
musique. Rien n’est écrit, mais le partenariat fonctionne. La musique continue.
Quentin, fils aîné de Jean-Philippe et d’Evelyne, rejoint l’ensemble.
Sa vie reste pourtant
un combat. « J’ai su à six ans ce qui m’attendait, des opérations
répétées et un mal persistant. C’est l’adolescence qui a été la plus dure. Je
m’isolais. Je pense que je me suis réfugié dans la musique. »
Aujourd’hui, Jean-Philippe
Pouilhe est l’exemple même d’un homme dont le désir de faire la musique fait
résonner sa vie entière – tout comme la maison de Vignolles doit résonner
lorsque ses deux fils trompettistes s’y mettent !
L’Union
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