04/03/2007

Une maison à la bibliothèque


Chaque détail est authentique. Le canapé est en cuir, les assiettes en poterie, le toit en ardoises, le parquet en lames de bois, la porte d’entrée en chêne. Même le journal qui traîne sur un tabouret porte un titre : « l’Union ».
La maquette de maison occupe tout l’espace disponible pour les expositions dans la bibliothèque. L’effet est celui d’une énorme maison de poupée – il faut deux hommes pour soulever le toit – mais l’intention est différente.
Une équipe de cinq infirmiers, trois hommes et deux femmes, soignants au Centre d’accueil thérapeutique à temps partiel (CCATP) de Belleu, a conçu ce projet, à mettre en œuvre par les usagers du Centre, handicapés mentaux, ou souffrant de troubles psychiatriques ou difficultés passagères, telle une dépression nerveuse. Ils y sont envoyées par un médecin, et ne sont soumis à aucune contrainte, notamment d’assiduité. De tous âges, ils participent à des ateliers de travail. Mais, insiste Daniel Dendrimont, un des infirmiers de l’équipe du projet, « il s’agit de soins, non pas de cours ». Il importe, non pas d’apprendre un métier, mais d’apprendre à mieux vivre.
Pour rompre l’isolement des différents groupes, et nourrir ainsi la communication et le partage, les ateliers de poterie, menuiserie, couture, peinture décorative, cuir et informatique ont collaboré à la construction et à l’aménagement de cette maison. Le cadre a été fourni par les soignants, mais les éléments qui composent la maison résultent des compétences, des idées, des goûts, des souhaits de chacun. Ceci explique le foisonnement d’objets délicieux, meubles, rideaux, bacs à fleurs, poste de télévision, éclairage… Ce n’est pas un jouet, mais les visiteurs de la bibliothèque, petits et grands, peuvent se réjouir de ce monde réduit dix fois, parallèle au grand dans lequel nous vivons.
Les infirmiers ont vu dans cette « villa Beaulieu » de grandes possibilités pour les usagers du Centre. Ils entendaient les amener à appréhender un sujet et s’y projeter à long terme (six mois de travail !), à se repérer dans un espace à trois dimensions et à résoudre les difficultés concrètes en se représentant un lieu de vie. C’était aussi une occasion de dialoguer, comparer des habitudes, découvrir les similitudes et les différences entre eux. Enfin, ils ont pu prendre du plaisir, être fiers du résultat final. Tout cela compte quand le monde paraît hors de portée, fermé, cruel ou incompréhensible.
Construire cette maison à l’échelle demandait de la dextérité manuelle. Un des usagers, racontent les infirmiers, très peu habile de ses mains, a réussi à découper les six cents petites ardoises du toit. Soyons rassurés : de grandes ouvertures ont été prévues, pour nous permettre d’épier les pièces et ce qu’elles contiennent. La maison est merveilleuse à regarder, mais la vraie merveille est le sens que lui donnent ceux qui l’ont faite.
L’Union
Anne-Marie Natanson, conservateur en chef de la bibliothèque, qui héberge la "Villa Beaulieu", avec trois infirmiers du CCATP, Daniel Dendrimont, Jean-Paul Ducornet et Gérard Monchoux.

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