20/01/2010

Motobécane : de la marge au centre


Quelques gloussements dans la salle ont accompagné le début de ce long monologue par l’acteur Bernard Crombey. Il est « Motobécane » – le surnom vient de son mode de transport habituel – en prison pour avoir hébergé une jeune fille qui fuguait. Un salaud, alors ? Au fur et à mesure qu’il se raconte, nous voyons plutôt un marginal, jamais intégré, mais innocent de ce qu’on lui reproche. Il a agi par bienveillance envers la fillette. Seulement, il est à l’écart de la société au point de ne pas envisager le jugement qu’elle allait porter sur son comportement. Au lieu de rayonner, son innocence est trop épaisse pour être visible.
Dans son jeu, l’acteur ne se permet aucune complaisance pour rendre Motobécane sympathique. Il prend même la mine rebutante des grands bourreaux qui nous regardent dans les pages de faits divers des journaux.
L’exploit de Bernard Crombey est d’amener cet homme de la périphérie sociale qu’il habite et de le planter devant nous, en dévoilant son humanité.
Les rires du début ? Ils reflètent l’autre défi relevé par Bernard Crombey : adopter un fort accent picard, inhabituel lui aussi sur une scène de théâtre. Au cinéma il ne fait que rire. Alors que le spectacle se déroule, aussi bien Motobécane que son accent émergent des positions marginales qu’ils occupaient pour investir le centre de notre attention. Non seulement ils deviennent émouvants, mais ils imposent le respect.
L'Union

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