Vincent Dussart est ferme : « On ne « passe » pas à un stage, on y participe. »
Pour raconter « L’état tragique » il faudra rester du début à la fin.
Sera-ce une interminable conférence sur la tragédie, ou une série de
démonstrations ? Pis encore, l’obligation de balbutier des tirades
raciniennes sur scène ?
Nous commençons par un long échauffement,
en observant les sensations qu’il génère. « Ces
sensations peuvent créer une sorte de déplacement dans le corps. » C’est
là que se trouve l’émotion à jouer. Cette
forme de théâtre fait appel au corps et non pas à l’imagination. Parlant de « Si j’étais.. », l’outil conventionnel
pour étudier un rôle, Vincent admet « Ca
me gonfle ». Sa vérité ne se trouve que dans le corps.
Lui-même a eu une première formation classique.
Plus tard, avec un collectif, il en est venu à cette conception plus proche de
Jacques Lecocq et du « théâtre physique ».
L’atelier crée un degré d’intimité parmi
la douzaine de stagiaires. Mais comme tout se passe sur la scène de la grande
salle du Mail, nous savons que nous ne sommes ensemble que pour du théâtre. Les
émotions ne s’expriment que pour mieux jouer. « De toute façon c’est au public d’être ému, pas à l’acteur. Il
est là pour jouer. »
Jouer la tragédie ? Vincent lance
un exercice qui met des couples ensemble, puis les prive du contact établi. « Cette position est essentiellement
tragique. » Il aborde ainsi le manque, le trou, qui pousse un
personnage de tragédie vers sa destruction.
Pour la suite nous devons disposer d’un
texte. « N’importe lequel, le sens on
s’en fiche. » Il me propose un extrait d’« Hercule furieux »
de Sénèque. Je suis déjà loin de ma gêne initiale ! Le fait de base au
théâtre, nous apprenons, est de subir le regard des autres. Mais du moment
qu’on accepte de se montrer tel qu’on est, ce malaise, le trac, se transforme
en source de puissance. « Le
théâtre » déclare Vincent « est
un merveilleux outil pour la connaissance de soi. »
Le lendemain, les stagiaires commencent
à « se sentir », et cela se voit. Au cours d’un autre long exercice à
deux, il nous encourage à essayer notre texte « quand vous le sentirez. » Après des hésitations, je dis le
mien. Je m’étonne de le trouver si naturel. Je le redis en riant. La troisième
fois, je l’entends monter de mes entrailles : « Que vois-je ? Ces cadavres sont ceux de mes fils. Voici le
corps de ma femme assassinée. Au secours, gens de Béotie ! » Je
joue la tragédie.
L’Union
Vincent
Dussart aide une stagiaire
à trouver dans son corps le sens de son texte.
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