18/08/2011

Entre les canaux et la haute mer

Entre un premier contact sur le quai et l’entretien plus tard, George Bee s’est ravisé. « Si vous voulez tout un discours sur les voiliers, je ne peux pas le faire. » Je le rassure : il s’agira surtout de parler de lui-même et de sa femme Ann, qui ont choisi de visiter notre ville.
L’« Ygraine » - du nom de la mère du roi Arthur- a attiré mon attention par le grand mât arrimé à l’horizontale sur la superstructure. Un filet de câbles le retient, comme pour l’empêcher de se dresser soudain en attente de voilure. « Quinze mètres de haut » précise George. Capable d’aborder les océans, il s’adapte ainsi à la navigation intérieure. Seul l’arrondi de la coque complique ses passages dans les écluses.
George a tout d’un vieux loup de mer, la carrure, l’allure, même le caractère de celui qui en a vu des choses de par le monde. Pourtant, il est clair : « Je ne suis pas un vrai navigateur à voile. Un vrai n’utiliserait jamais le moteur, alors que nous, face à un calme plat…. »
Ils sont à quai depuis quinze jours, en partie parce qu’ils attendent une cale sèche près de leur village de Melton dans l’est de l’Angleterre. Ann Bee avait gardé un bon souvenir d’un passage précédent ici. Ils apprécient l’escale de Soissons, de petites choses telles le wi-fi gratuit à l’office de tourisme. Le français ? Selon George, Ann le parle mieux dans la cabine du bateau qu’à terre.
Depuis trois ans ils voyagent l’été, puis rentrent chez eux en laissant le voilier à Nevers. Ann admet préférer la navigation intérieure, alors que George aime voguer en mer. Avant les canaux, ils avaient donc fait deux trajets par le rail d’Ouessant et le golfe de Gascogne, jusqu’à la Méditerranée.
Avant la retraite, George avait conduit des engins de terrassement, et Ann avait été infirmière d’abord dans un hôpital psychiatrique, puis avec un vétérinaire. « Ah, j’ai aimé soigner les animaux ! » Par bonheur, George avait appris à naviguer à son école, sur un baleinier. « A douze ans, j’ai même dit à mon père qu’un jour je ferais le tour du monde. »
Peut-être parce qu’ils ne restent nulle part, les navigateurs aiment se rencontrer entre eux. George et Ann me donnent des nouvelles d’autres navigateurs qui ont été en leur temps « visiteurs de l’été » dans l’Union.
Ils aiment la France, y trouvant une qualité de vie perdue ailleurs. « Venir ici c’est comme retourner trente ans en arrière » disent-ils avec délice.
L’Union

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