30/03/2005

Hubert Willaume : histoires de musique

Juste derrière la porte d’entrée de la maison de Hubert Willaume à Soissons, l’histoire de sa famille, passée, présente et à venir, est en place : l’Encyclopédie de Diderot dans une bibliothèque, sur les murs des bois de cerf, œuvre d’un grand‑père taxidermiste – et un babyfoot « pour mes petits enfants ».
Son passé familial, qui revient si souvent dans la conversation, n’est ni fardeau ni source de vanité, mais nourrit plutôt ses choix de vie, et donne de la cohérence et de la profondeur à son expérience du monde.
Hubert est membre du Cercle Musical de Soissons, avec lequel son arrière grand oncle Jules jouait déjà en soliste en 1865. Cet enfant prodige « a été repéré tout jeune à Villers‑Cotterêts par Alexandre Dumas ». Le violon que joue Hubert porte une inscription, sa dorure frottée par des générations de mentons, indiquant qu’il a été présenté à Jules Willaume par le « Conservatoire Impérial de Musique ».
Son grand‑père joue pour les mariages et communions, accompagne des films muets, puis change de métier et crée une entreprise d’assainissement dont les camions affichent encore le nom de famille dans le pays. Son père se tient à distance de la musique, mais Hubert s’émeut en admettant qu’il a lui‑même appris le violon « au fond, pour plaire à ma grand’mère ». Mais sans en faire sa profession : Jules n’était‑il pas mort à trente ans pendant le siège de Paris, « peut‑être d’avoir eu ce métier crève‑la‑faim » ? Athlète de niveau national, « je voulais être prof de gym, mais le bac m’est passé sous le nez, et je suis devenu kiné – prof de gym médical en quelque sorte ». Il travaille avec les survivants de l’épidémie de polio des années quarante, et élargit constamment ses compétences pour inclure la psychomotricité et la préparation à l’accouchement sans douleur, jusqu’à sa retraite.
Hubert joue dans le quatuor à cordes Lanner, et chante, en soliste et en petit ensemble. Même une aventure musicale peut tenir de l’épique : devant apprendre un air de Tchaïkovski, il déniche un compagnon d’Emmaüs d’origine russe pour l’aider. Et l’amour de la musique gagne la génération de ses enfants.
Car il ajoute à la fresque historique peinte par ses aïeux. Il aménage et agrandit les terres de chasse à Hartennes dont il a hérité. « Si je suis chasseur, c’est que j’y suis allé à la chasse à courre avant de naître, le jour où ma mère a eu les « honneurs du pied » ‑ le pied de cerf qu’elle reçoit est à côté des bois au mur.
L’histoire n’a pas toujours été tendre avec Hubert Willaume et sa femme Bernadette. Mais écouter cet homme d’émotion dire ses joies et ses peines, c’est se rendre compte que, loin de se perdre dans son histoire familiale, il s’y trouve.
L’Union

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