C’est comme si un prestidigitateur exposait toutes ses ficelles avant de commencer, puis époustouflait quand même son public par la magie abracadabrante de son tour.
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Jean-Louis Ouvrard au milieu des ventilateurs après le spectacle du Mail. |
Dans « L’après-midi d’un foehn » de Phia Ménard, le marionnettiste Jean-Louis Ouvrard est raide dans un long manteau croisé. Il découpe des sacs en plastique de supermarché, en troue un, ajoute un carré pour la tête et deux tubes pour les bras, scotche tout, et le jette en boule au milieu d’un cercle de puissants ventilateurs, qu’il met en route. Il est facile de deviner que la boule se dépliera, se gonflera. Mais comment prévoir la suite ? La forme vaguement humaine se met à danser, tourner, s’allonger, se relever, sous le seul effet de l’air soufflé. Il est rejoint par un partenaire, et ils se lancent dans un extatique pas de deux. Le tourbillonnement attire une foule de leurs semblables, qui volent de plus en plus haut, replongent, s’écrasent, repartent.
L’homme arrive, se prête solennellement au jeu, puis sort ses ciseaux et commence à déchirer ce qu’il a fait. Il ne laisse que des formes mutilées, des lambeaux, mais la folle danse continue. Créateur-destructeur, ou la raideur refusant la mobilité ? « C’est à chacun d’interpréter » confie Jean-Louis Ouvrard après le spectacle.
C’est ingénieux, comique, mais surtout émouvant. En résumant l’être à quelques traits, la marionnette, au lieu de réduire l’humain, dégage toute la grâce fragile du corps et, plus étonnant, du cœur de l’homme.
L'Union
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